À Tillabéry, des centaines d’acteurs associatifs et institutionnels se réunissent pour repenser le rôle des ONG dans la refondation du Niger. Trois jours de débats pour renforcer la coordination, exiger plus de transparence et ancrer les actions humanitaires dans une logique de développement endogène. Un tournant stratégique dans un pays en quête de souveraineté.
Tillabéry, 29 octobre 2025 – Ce matin, la ville de Tillabéry s’est transformée en carrefour stratégique du plaidoyer pour un développement autonome. Des centaines de représentants d’ONG et d’associations de développement, venus des quatre coins du pays, ont convergé vers la cité pour le lancement du Forum national consacré à leur rôle dans la refondation de la nation. S’étendant sur trois jours, l’événement réunit acteurs humanitaires et officiels afin de dessiner une feuille de route plus coordonnée et plus efficace face aux défis sécuritaires et socio-économiques qui pèsent sur le Niger.

ONG, un diagnostic sans détour : vers une intervention alignée sur les priorités nationales
Sous le slogan évocateur “ONG et associations de développement : quelle intervention pour un développement endogène ?”, le forum entend dépasser les constats superficiels pour plutôt ausculter en profondeur le paysage associatif nigérien. L’objectif est double : cartographier les forces et faiblesses des interventions sur le terrain, et surtout proposer des remèdes concrets pour aligner ces structures sur les priorités de souveraineté et d’autonomie.
Parmi les voix fortes de l’ouverture, le ministre d’État à l’Intérieur, à la Sécurité publique et à l’Administration territoriale, le général de division Mohamed Toumba, a donné le ton. En sa qualité de superviseur du secteur, il a en effet dénoncé les dysfonctionnements persistants : non-respect des réglementations, opacité dans la gestion des fonds étrangers, et impact souvent dilué des projets financés.
“Cette rencontre est une opportunité rare pour aborder frontalement ces blocages, qui freinent notre marche vers une refondation solide”, a-t-il martelé, appelant à une vigilance accrue pour que les aides extérieures servent les communautés, et non les contournent.

De l’échange à l’action : vers une coordination renforcée des ONG
Pendant les 72 heures, des panels thématiques, des ateliers interactifs et des tables rondes rythmeront les débats. Ministres, hauts fonctionnaires et leaders associatifs croiseront les regards afin de mieux synchroniser les actions, éviter les doublons coûteux et maximiser les retombées dans les zones critiques, notamment au Sahel nigérien, où pauvreté et insécurité se disputent le terrain.
Ce forum s’inscrit clairement dans la mission confiée par le chef de l’État au ministre Toumba – l’objectif numéro 8 de sa lettre de mission – qui l’enjoint à renforcer la régulation du secteur associatif. À l’issue des travaux, une série de propositions est attendue : protocoles de suivi, mécanismes de traçabilité des financements, ainsi qu’une feuille de route opérationnelle pour ancrer les initiatives dans une logique de développement « made in Niger ».
Ces engagements pourraient d’ailleurs redéfinir les partenariats entre Niamey et les bailleurs internationaux, en plaçant l’endogénéité au cœur du dispositif.

Tillabéry, miroir d’un tournant national
Dans un Niger en pleine recomposition , où le gouvernement mise sur la souveraineté pour contenir les crises multiples, ce forum dépasse le cadre d’une simple concertation. Il incarne plutôt un virage stratégique : faire des ONG, longtemps perçues comme des acteurs exogènes, des partenaires d’un projet national inclusif.
Tillabéry, avec son héritage fluvial et sa résilience face aux aléas climatiques, offre un décor symbolique à ces échanges. Elle rappelle que le développement durable ne s’impose pas d’en haut : il germe sur les rives locales.
Il reste à voir si les résolutions tiendront la route au-delà des discours. Pour l’heure, la cité fluviale vibre d’un espoir pragmatique : celui d’un Niger qui reprend la main sur ses priorités, et qui entend aussi les faire respecter. Par ailleurs, les conclusions, attendues vendredi, pourraient bien sceller un nouveau pacte entre humanitaire et souveraineté.
