Niger : La loi sur la cybercriminalité menace gravement la liberté d'expression - Journal du Niger

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Niger : La loi sur la cybercriminalité menace gravement la liberté d’expression

Au Niger, une loi sur la cybercriminalité fait trembler les libertés fondamentales : Une menace grandissante au cœur du Sahel…

Une nouvelle loi nigérienne sur la cybercriminalité, réintroduisant des peines de prison, suscite l'indignation des avocats et des défenseurs des droits humains qui craignent une atteinte grave à la liberté d'expression en ligne.

Au Niger, une loi sur la cybercriminalité fait trembler les libertés fondamentales : Une menace grandissante au cœur du Sahel

Dans un Niger déjà secoué par des crises politiques et sécuritaires, une nouvelle ombre plane sur la liberté d’expression. En effet, une loi sur la cybercriminalité, renforcée en juin 2024, suscite une levée de boucliers parmi les défenseurs des droits humains et les professionnels du droit. L’Association des jeunes avocats du Niger (AJAN) tire la sonnette d’alarme, dénonçant un texte qui, loin de protéger, risque d’étouffer les voix critiques dans un pays où elles sont déjà fragiles.

Une nouvelle loi  : Un virage répressif inattendu

Adoptée en 2019 pour répondre aux défis du numérique, cette loi avait initialement été perçue comme un outil moderne de régulation. Cependant, sa version amendée, entrée en vigueur le 7 juin 2024, a pris une tournure bien plus sombre. Elle réintroduit des peines de prison pouvant atteindre cinq ans pour des infractions en ligne, comme la publication de contenus jugés « troublants pour l’ordre public » ou « attentatoires à la dignité humaine », des termes si flous qu’ils laissent la porte ouverte à toutes les interprétations. Fait troublant : même des informations vérifiées peuvent désormais conduire leurs auteurs derrière les barreaux.

Ce durcissement marque un retour en arrière brutal. Pourtant, en 2022, le Niger avait opté pour une approche plus clémente, troquant les peines de prison contre des amendes. Un progrès salué à l’époque comme un pas vers le respect des normes internationales. Mais ce revirement soudain, dans un contexte de tensions sécuritaires et politiques, soulève des questions sur les véritables intentions du gouvernement.

Une mobilisation juridique et internationale

L’AJAN n’a pas tardé à réagir. Réunie en urgence le 2 juillet 2025, l’association a publié une déclaration cinglante, qualifiant cette réforme de « recul criard des libertés fondamentales ». Pour ces jeunes avocats, le danger réside dans l’ambiguïté du texte, qui pourrait devenir une arme pour museler la presse, les militants et les citoyens ordinaires. « Ce développement marque une régression significative des libertés d’expression, de la presse et d’opinion », martèle l’AJAN, appelant à une révision urgente pour aligner la loi sur les engagements internationaux du Niger, notamment ceux inscrits dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

Le tollé dépasse les frontières. En effet, dès juin 2024, Reporters sans frontières (RSF) avait mis en garde contre les dérives potentielles de cette législation. Selon l’organisation, ses contours imprécis en font un outil idéal pour « emprisonner et censurer les journalistes exerçant en ligne ». Une crainte d’autant plus légitime que le Niger, classé 61e sur 180 dans l’Indice mondial de la liberté de la presse 2024 de RSF, offre un terrain déjà hostile aux médias.

La nouvelle loi  : Un climat de peur pour les voix dissidentes

Les implications de cette loi vont bien au-delà des cercles militants ou journalistiques. Dans un pays où les réseaux sociaux sont devenus un espace vital pour le débat public, elle menace de réduire au silence quiconque oserait défier le pouvoir. Le spectre de la prison plane désormais sur chaque publication, chaque commentaire, chaque cri numérique. Pour les journalistes, déjà confrontés à des pressions et des intimidations, ce texte pourrait sonner le glas d’une liberté d’expression déjà chancelante.

Le contexte politique n’arrange rien. Depuis l’avènement du général Abdourahamane Tiani à la tête du pays, les promesses de retour à la démocratie peinent à convaincre. Cette loi, perçue comme un outil de contrôle, contredit les discours officiels et alimente les soupçons d’une dérive autoritaire. L’AJAN le rappelle avec force : même en « période d’exception », les droits humains ne sauraient être sacrifiés.

Un appel à la vigilance

Face à cette offensive contre les libertés numériques, l’AJAN ne se contente pas de critiquer : elle agit. Son appel à réformer la loi est un cri pour préserver un avenir où la parole reste libre, où la vérité ne soit pas un crime. Car au Niger, comme ailleurs, le numérique est plus qu’un outil : c’est un champ de bataille pour la démocratie.

Alors que le pays cherche à se relever de ses tumultes, cette législation pose une question cruciale : la stabilité peut-elle se construire sur le silence imposé ? Pour l’AJAN et ses alliés, la réponse est claire : une nation forte est une nation qui écoute, pas une nation qui bâillonne. Le combat pour les libertés fondamentales au Niger ne fait que commencer, et il résonne comme un avertissement pour toute la région.

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