Secteur halieutique: l'approche écosystémique des pêches - Journal du niger

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Secteur halieutique: l’approche écosystémique des pêches

Le responsable des opérations et analyste de projets du Programme Nansen, Kyriakos Kourkouliotis, soutient dans une analyse, une approche de…

Le responsable des opérations et analyste de projets du Programme Nansen, Kyriakos Kourkouliotis, soutient dans une analyse, une approche de développement « holistique » pour créer les bases d’un développement harmonieux et consensuel, et proposer un accompagnement efficient aux récipiendaires.

L’approche écosystémique des pêches (AEP) considère les interactions entre les dimensions biologiques, environnementales, économiques et sociales du « système pêche » et place la personne au centre du développement.

Le Programme Nansen exécuté par la Division de la pêche et de l’aquaculture l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), collabore avec 30 pays d’Afrique, dont la Côte d’Ivoire, et 5 pays du sud-est Asiatique pour améliorer les connaissances scientifiques des ressources halieutiques et de l’impact du changement climatique et pollution sur l’environnement marin. Il vise en outre à renforcer les mécanismes de gestion des ressources halieutiques et les capacités nationales.

Dans cette analyse, M. Kyriakos Kourkouliotis, estime qu’agir uniquement sur les aspects biologiques des ressources ne peut répondre positivement aux aspirations des communautés qui vivent de la pêche, ni de l’administration en charge de la gestion du secteur. Il y a lieu d’intégrer d’autres aspects et les combiner pour apporter aux défis une réponse plus holistique. Il juge par ailleurs que les financements externes pour les actions de développement ne peuvent à eux seuls suffire et nécessitent la mise à disposition de fonds nationaux de contrepartie pour garantir la pérennité.

Il émet l’idée que dans les pays qui ont un fort potentiel halieutique, il pourrait être envisagé de créer un mécanisme de financement, tel qu’un Fonds de développement alimenté par les redevances et autres revenus du secteur pour cofinancer et garantir la pérennité des actions menées avec les bailleurs de fonds dans le secteur halieutique.

La création de mécanismes de financement et leur gestion rigoureuse peuvent être considérées comme une preuve tangible de l’engagement et la volonté des pays en tant qu’entité centrale responsable de leur développement.

De ce fait, il est attendu des autorités nationales que cette forme de « taxation » soit équitablement prélevée et distribuée, et l’allocation des fonds transparente pour appuyer les initiatives au développement du secteur de la pêche. Toute chose qui favoriserait une synergie des parties prenantes et permettrait de prendre la relève et poursuivre les actions au départ du bailleur.

Il note que la gestion des pêcheries est notamment une prérogative de chaque pays et ne peut être mise en œuvre à travers des projets financés et exécutés exclusivement par des bailleurs de fonds sans l’implication des pays par un investissement propre tant au niveau financier qu’humain.

Il devient fondamental de renforcer le sentiment national d’appropriation du processus. Cela requiert certaines aptitudes et compétences au niveau des administrations de pêches, ainsi que des modalités de mise en œuvre et de suivi nationales.

L’idée étant d’absorber les apports techniques apportés par l’aide extérieure en vue de les intégrer dans un modèle national de gestion des pêches pour une utilisation plus large visant la pérennisation institutionnelle. Pour ce qui est des études techniques en appui à la gestion des pêches et des initiatives d’accompagnement des communautés pour rehausser leur moyens d’existence et niveau de vie, il devient impératif de se doter de gestionnaires capables d’administrer les actions et projets nationaux.

Nul ne peut contester l’évidence que les politiques d’aide au développement menées jusqu’à ce jour, et en particulier dans le secteur de la pêche, ont produit des résultats utiles, mais il est tout aussi évident qu’ils n’ont pas été en mesure de réduire significativement la pauvreté.

Un changement d’approche est indispensable au risque de faire perdurer l’ancien modèle désuet. Le Programme Nansen a mis en place dans certains pays, dont la Côte d’Ivoire, des projets qui promeuvent une approche holistique à travers l’approche écosystémique des pêches et des modalités de gestion nationales pour l’exécution de ces projets pour encourager des pratiques de gestion des pêches plus durables.

Le Programme a privilégié une approche guidée par la demande répondant aux priorités locales. Ces projets s’inscrivent dans le temps et s’intègrent dans les institutions sectorielles nationales. Ces projets nationaux jouent par ailleurs un rôle catalyseur, permettant d’utiliser leurs assises pour lancer d’autres initiatives locales.

Le problème des déchets marins se pose aujourd’hui dans le monde entier, avec des impacts qu’il engendre au niveau social, économique et écologique. L’objectif était de lancer une étude à travers ces projets pour mieux comprendre les impacts des déchets marins sur les pêcheries appuyées par le Programme Nansen. Les résultats attendus permettront de faire progresser les connaissances sur la présence de débris marins et de microplastiques dans les écosystèmes marins et contribuer à améliorer les politiques et les pratiques nationales.

Le Programme Nansen n’a pas la vocation de répondre directement à cette problématique des déchets marins mais à travers les projets nationaux, il a la capacité de déclencher une prise de conscience de l’impact de ces déchets sur les pêcheries et les écosystèmes et mobiliser les acteurs nationaux et internationaux, qui ont un mandat dans ce domaine, et ainsi inclure le secteur des pêches dans les politiques nationales de gestion des déchets.

L’économiste rappelle que la prise de conscience de l’importance de l’aide au développement et la reconstruction des États s’est développée avant la fin de la seconde guerre mondiale. Initialement, l’objectif était d’aider les pays d’Europe, dévastés par la guerre à se remettre sur pieds.

Le renforcement des institutions et les initiatives d’accompagnement économiques et sociales ont permis progressivement d’avancer et rehausser le niveau sociétal. Il en est de même avec les pays du Sud, qui doivent devenir les protagonistes à part entière de leur propre développement et non le subir, pour pouvoir progresser. 

M. Kyriakos Kourkouliotis fait observer que les instabilités politiques et l’interruption de la continuité des actions suite aux changements de gouvernements ne peuvent qu’affecter la performance du secteur public qui reste faible, dans les pays en développement.

N’étant pas en mesure de renforcer la capacité des agents et des institutions, ni de faciliter le développement du bien-être sociétal, le développement économique s’amorce difficilement.

Le caractère persistant du sous-développement, ne peut être défini comme une fatalité, mais plutôt un ensemble de prises de décisions et d’approches désormais dépassées sur le choix de modèle de développement.

Le développement, selon lui, exige une approche méthodologique et plurisectorielle à travers des processus économiques et sociaux intégrés impliquant tous les acteurs de la société. Apporter une aide à la population n’a de sens d’un point de vue efficacité que si d’une part elle intègre toutes les autres dimensions sociales, écologiques, éducatives, de la santé, du transport, etc, dit-il.

 Le développement économique et social doit toucher divers secteurs en même temps et créer des complémentarités et synergies. Seulement si arrivé à une masse critique, un pays pourra monter d’un cran dans l’échelle du bien-être sociétal.

 Un quart de la population mondiale continue à vivre avec moins de 1,50 USD par jour et les écarts de richesse entre les pays développés et en développement ne cesse de s’accroitre. Les pays avec des faibles capacités institutionnelles et politiques, où le tissu économique productif et social est fragile restent particulièrement vulnérables.

 Il est urgent de prendre conscience que les pays développés et ceux dits émergents sont actuellement en phase de mutation stratégique et technologique. Les décisions stratégiques d’investissements vers le numérique, l’intelligence artificielle et les énergies renouvelables vont créer des nouveaux marchés avec des réseaux où les pays en développement risquent d’être écartés.

Il y a lieu de répondre urgemment aux écarts et disparités qui ne cessent de s’accroitre entre pays développés et pays en développement, que ce soit en matière de croissance, de revenu, scientifique, économique, technique, ou autres, poursuit-il.

A défaut d’actions concertées à travers une nouvelle approche pour faire converger les pays en développement vers le nouveau dessein mondial risquerait de les écarter davantage, mentionne l’analyste gestionnaire Kourkouliotis.

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