mars 2020 - Page 15 sur 36 - Journal du Niger

Les Bourses du Golfe plongent à l’orée d’une guerre des prix du pétrole

Les Bourses du Golfe ont atteint dimanche leur plus bas niveau depuis des années, alors que se dessine une guerre des prix pétroliers après l’échec de négociations entre l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) et la Russie sur des réductions de production.

L’Opep et ses alliés, Moscou en tête, n’ont pas réussi à s’entendre vendredi à Vienne sur des coupes supplémentaires dans leur production pour faire face à la baisse de la consommation mondiale d’or noir en raison de l’épidémie du nouveau coronavirus.

La Russie s’est opposée à une nouvelle réduction de 1,5 million de barils par jour destinée à enrayer la chute des cours du brut, qui ont encaissé une baisse brutale à l’annonce de l’échec des négociations.

En réponse, l’Arabie saoudite, premier exportateur mondial de brut, dont dépendent ses recettes, a entamé une guerre des prix en procédant à sa plus grande réduction depuis une vingtaine d’années, selon l’agence Bloomberg, inondant ainsi le marché de barils à bas coût.

Ryad a réduit son prix pour livraison en avril de 6 dollars par baril comparé au mois de mars en Asie, de 7 dollars aux Etats-Unis et de 6 à 8 dollars en Europe occidentale et en région méditerranéenne où la Russie vend une grande partie de sa production.

– « Bain de sang » –

« L’Arabie saoudite répond au rejet de la Russie sur des réductions de production en lançant une guerre des prix », explique à l’AFP Bill Farren-Price, du centre de recherche Petroleum Policy Intelligence.

« Ils vont augmenter les volumes (d’exportations) et chercher à tout prix à gagner des parts de marché. Les prix du pétrole s’effondreront lundi » lorsque les marchés mondiaux s’ouvriront, prédit-il.

Selon Bloomberg, l’Arabie saoudite aurait évoqué la possibilité d’augmenter sa production, actuellement de 9,7 millions de barils par jour, alors qu’elle l’avait drastiquement réduite à partir de 2017 dans le cadre d’un accord de l’Opep et de ses alliés pour soutenir les prix.

« La combinaison d’une production pétrolière plus élevée et d’une demande plus faible due au (nouveau) coronavirus rend (un effondrement des prix) inévitable. On va vers un bain de sang », estime l’expert.

Une guerre des prix du pétrole en 2014 avait déjà fait chuter les cours à moins de 30 dollars le baril, affectant lourdement les économies du Golfe, obligées de recourir à des mesures d’austérité inédites pour combler leur déficit budgétaire.

Les cours du pétrole ont déjà dégringolé de plus de 30% depuis le début de l’année sur fond de ralentissement économique dû à la propagation du nouveau coronavirus.

Vendredi, l’échec de la réunion de Vienne a fait s’effondrer le WTI, baril de référence aux Etats-Unis, de plus de 10% à 41,28 dollars. Le baril de Brent de la mer du Nord a lui chuté de plus de 9% à 45,27 à Londres, des niveaux plus vus depuis près de quatre ans.

– Golfe dans le rouge –

Déjà affectée par la propagation de la maladie Covid-19 et la baisse des prix du pétrole, la Bourse saoudienne, classée parmi les plus grandes places internationales en termes de valorisation, a clôturé en baisse de 8,3% dimanche et a atteint son plus bas depuis novembre 2017.

L’action du mastodonte pétrolier Saudi Aramco a dégringolé à 30 riyals, atteignant pour la première fois un prix inférieur à celui de lancement (32 riyals) en décembre lors d’une introduction en grande pompe à Ryad qui avait battu tous les records.

Avec la réduction décidée vendredi, Aramco vend son baril d’Arabian Light à un prix sans précédent: 10,25 dollars en dessous du baril de Brent de la mer du Nord, selon Bloomberg.

Cette chute intervient également sur fond de turbulence politique en Arabie saoudite, où les autorités ont arrêté vendredi trois princes accusés d’avoir comploté pour renverser le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane.

Les six autres Bourses du Golfe ont clôturé dans le rouge, après une journée de ventes d’actions dans la panique en raison des craintes de voir s’effondrer les prix de l’énergie, principale source des recettes publics dans la région.

La Bourse de Dubaï a dévissé de 7,9%, atteignant son niveau de clôture le plus bas en six ans, tandis que la place de l’émirat voisin d’Abou Dhabi a chuté de 5,4%.

Celle du Qatar a enregistré une baisse de 2,9 % et atteint son plus bas niveau depuis la mi-2018.

L’indice principal de la place du Koweït, Premier Index, a dégringolé de 10% tandis que l’indice All-Shares a baissé de 8,3%.

Les marchés financiers, moins importants, de Bahreïn et d’Oman ont chuté respectivement de 3,4% et 2,8%.

Biden et Sanders engrangent les soutiens avant leur premier duel

La sénatrice noire Kamala Harris pour l’un, le célèbre militant des droits civiques Jesse Jackson pour l’autre: Joe Biden et Bernie Sanders ont chacun reçu dimanche un soutien de poids à deux jours de leur premier « tête-à-tête » de la primaire démocrate.

Le duel qui s’est dessiné cette semaine après le « Super Tuesday » commence à prendre forme, et les deux septuagénaires voient leurs troupes grossir à l’approche d’un autre gros mardi électoral.

Alors que six nouveaux Etats (Dakota du Nord, Idaho, Michigan, Mississippi, Missouri et Washington) se prononceront dans la course à l’investiture démocrate pour la présidentielle, Joe Biden, 77 ans, a reçu le ralliement d’une ancienne rivale, Kamala Harris.

La sénatrice de 55 ans, qui espérait devenir la première présidente noire des Etats-Unis, avait fait un début de campagne remarqué, prenant notamment à partie l’ancien vice-président sur la question raciale lors d’un débat télévisé en juin.

Mais le soufflé est vite retombé pour l’ancienne procureure de Californie, qui a jeté l’éponge en décembre faute de fonds suffisants pour financer sa campagne, et laisse désormais derrière elle ses différends avec Joe Biden.

« Je crois vraiment en Joe, que je connais depuis longtemps. Nous avons aujourd’hui besoin d’un dirigeant qui se préoccupe vraiment des gens et peut donc les rassembler. Et je pense que Joe peut y parvenir », affirme-t-elle dans une vidéo publiée dimanche sur son compte Twitter.

Sur le même réseau, l’intéressé l’a remercié au nom de sa famille pour avoir « consacré sa carrière à se battre pour les laissés-pour-compte », souvent aux côtés de son fils Beau Biden, lui-même ancien procureur du Delaware et décédé en 2015.

– « Truqué? » –

Pete Buttigieg, Amy Klobuchar, Beto O’Rourke, Mike Bloomberg… Au nom du « rassemblement » nécessaire pour éviter l’éparpillement des voix, les ralliements à Joe Biden se sont multipliés depuis ses succès en Caroline du Sud et lors du « Super Tuesday ».

Tous ont estimé qu’il était le mieux placé parmi les modérés pour faire barrage à Bernie Sanders, dont les idées très à gauche pour les Etats-Unis font peur au sein de l’establishment démocrate.

L’appareil du parti s’est mis en marche pour mettre hors course le sénateur du Vermont, a encore analysé samedi soir sur Twitter le président républicain Donald Trump.

« Les démocrates ne veulent pas entre parler de Bernie le dingue. Truqué? », a-t-il écrit, se demandant notamment pourquoi Elizabeth Warren ne s’était pas retirée avant le « Super Tuesday », ce qui a coûté des voix à Bernie Sanders.

La sénatrice progressiste, qui a quitté vendredi la course à la Maison Blanche après une série de revers cuisants, n’a encore officiellement apporté son soutien à aucun des deux grands candidats encore en lice.

– Vote noir –

Dans le duel qui l’oppose désormais à Joe Biden, Bernie Sanders, 78 ans, a lui aussi reçu dimanche un soutien significatif: celui de Jesse Jackson, l’une des figures du combat pour les droits civiques.

« Bernie Sanders représente la voie la plus progressiste » pour permettre aux Afro-Américains de rattraper leur retard d’un point de vue économique et social, a expliqué le pasteur, une « prise » de choix pour le socialiste autoproclamé, moins populaire que son rival auprès de l’électorat noir.

Figure très respectée au sein de la communauté afro-américaine, Jesse Jackson a contribué à « changer la politique américaine » et à « transformer le pays aux côtés de Martin Luther King », a salué Bernie Sanders, « très fier » de ce soutien.

Les deux hommes doivent s’afficher ensemble dimanche lors d’un meeting de campagne à Grand Rapids, dans le Michigan, un Etat également convoité par Joe Biden, soutenu localement par la gouverneure Gretchen Whitmer.

« Joe a été là pour le Michigan quand nous étions dos au mur », a confié cette dernière à l’AFP, en référence notamment à ses efforts pour sauver l’industrie automobile de la faillite après la crise financière de 2008, lorsqu’il était vice-président de Barack Obama.

« Je pense que l’élection sera serrée dans le Michigan », a prédit la gouverneure de cet Etat de la « Rust Belt », région industrielle du nord des Etats-Unis.

Syrie: démarches pour prévenir toute propagation du coronavirus parmi les déplacés (OMS)

Des démarches sont en cours pour prévenir une propagation du nouveau coronavirus à Idleb, région de Syrie où s’entassent des milliers de déplacés et qui est déjà le théâtre d’un drame humanitaire du fait de la guerre, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Aucun cas de Covid-19 n’a pour le moment été signalé en Syrie mais son « système de santé fragile pourrait ne pas être en mesure de détecter et de répondre » à une épidémie, a indiqué dimanche à l’AFP un porte-parole de l’organisation, Hedinn Halldorsson.

Le risque d’une apparition du virus est particulièrement préoccupant à Idleb, où quelque trois millions de personnes sont prises au piège, cette région du nord-ouest syrien ayant fait l’objet ces derniers mois d’intenses bombardements du régime et de son allié russe contre l’ultime grand bastion rebelle et jihadiste du pays.

Près d’un million de personnes ont été déplacées depuis décembre dans le cadre de l’offensive de Damas dans cette province, où les camps déjà saturés continuent de voir affluer des déplacés, malgré la récente annonce d’un cessez-le-feu.

Les infrastructures médicales, ravagées après près de neuf ans de guerre, ont été ciblées lors de récents bombardements.

Incapable d’assister la population depuis les territoires contrôlés par le régime, l’OMS affirme apporter une assistance humanitaire aux populations du nord-ouest via la frontière turque toute proche.

« L’OMS s’est associée à plusieurs partenaires et aux autorités locales sanitaires, (…) avec un plan d’action intégré », a souligné M. Halldorsson.

Les équipes médicales nationales sont « en cours de formation et les laboratoires d’Idleb et Ankara sont en train d’être préparés et approvisionnés pour tester et diagnostiquer le virus en toute sécurité », a-t-il ajouté.

– Equipements « trop chers » –

La région d’Idleb bénéficie d’une rare période d’accalmie depuis l’entrée en vigueur vendredi de l’accord de cessez-le-feu russo-turc.

Mais si l’offensive reprend, beaucoup craignent qu’elle ne mette en péril les efforts de prévention vis-à-vis du virus.

S’il fait son apparition, la situation à Idleb sera « particulièrement propice à une propagation », a souligné auprès de l’AFP Misty Buswell, du Comité international de secours (IRC).

« Une épidémie serait dévastatrice pour des milliers (de personnes) dont l’état de santé est déjà fragilisé par le manque de nourriture, d’eau potable et par l’exposition au froid », a-t-elle ajouté.

L’IRC se concentre sur le « développement des mesures de prévention » et la sensibilisation tout en fournissant le matériel médical nécessaire et en renforçant la surveillance, selon elle.

Mustapha al-Abdo, du département de la Santé à Idleb, a lui demandé la mise en place d’un centre médical isolé pour recevoir d’éventuels malades.

Il a également appelé les organisations humanitaires à équiper les professionnels de santé de tests, masques, gants et autres équipements de prévention.

Des médecins locaux se mobilisent également.

Près de la frontière turque dimanche, Zaher Hanak, un médecin syrien, a donné une conférence sur la prévention sanitaire face au nouveau coronavirus devant une vingtaine de personnes.

Cette conférence était nécessaire pour combattre le manque d’information du public, a-t-il dit à l’AFP.

« Les autorités locales cherchent actuellement un endroit pour la mise en quarantaine » de cas potentiels, a ajouté M. Hanak. Mais certains équipements pour détecter le virus sont indisponibles car ils sont trop chers, a alerté le médecin.

Virus oblige, le pape en direct vidéo pour contenir l’épidémie

Pèlerins et touristes dispersés sur l’immense place Saint-Pierre de Rome ont pu écouter dimanche sur des écrans géants le pape parler en direct par vidéo depuis sa bibliothèque privée, une première pour François destinée à réduire les contacts en pleine épidémie de coronavirus.

« C’est un peu étrange cette prière de l’Angélus d’aujourd’hui, avec un pape en cage dans la bibliothèque, mais je vous vois, je suis proche de vous! » a lancé en préambule le pape argentin.

La traditionnelle prière dominicale de l’Angélus se fait depuis 1954 à la fenêtre du palais apostolique surplombant la place. Mais le Vatican avait annoncé samedi un bouleversement des habitudes pour « éviter les risques de diffusion » du coronavirus.

Le pape a eu dimanche une pensée pour les personnes affectées par le nouveau coronavirus dans le monde. « Je suis proche par la prière des personnes qui souffrent de l’actuelle épidémie de coronavirus et de tous ceux qui les soignent », a souligné François, lui-même affecté depuis une dizaine de jours par un simple rhume qui a fait couler beaucoup d’encre.

C’était la première fois qu’il quittait son domicile de la résidence Saint-Marthe, à quelques pas de la Basilique Saint-Pierre, depuis l’audience en plein air du mercredi 26 février où il avait fait le tour de la place en papamobile et serré des dizaines de mains.

« Je m’unis à mes frères évêques pour encourager les fidèles à vivre ce moment difficile avec la force de la foi, la certitude de l’espoir et la ferveur de la charité », a dit le pape, qui s’est finalement rendu à la célèbre fenêtre surplombant la place pour saluer la foule présente.

– « Un bonus » –

« Nous avions entendu qu’il ne sortirait pas, nous avons pris de superbes photos sur la place, mais voir finalement le pape était un bonus », a confié à l’AFPTV Steve Povey, un commercial britannique de 57 ans.

« Nous avons le virus dans notre pays. Si cela doit m’arriver de le contracter, cela arrivera », a-t-il commenté, stoïque.

Un Français retraité originaire d’Alsace (est), Jean-Louis Gehl, a aussi noté, fataliste: « on peut l’attraper aussi bien chez nous ». « Pour moi c’est comme une grosse grippe », a-t-il minimisé.

La foule plus clairsemée qu’à l’habitude se promenait dimanche sur la place Saint-Pierre sans être contenue derrière des barrières et sans passer de contrôles de sécurité, ce qui aurait entraîné des files rendant difficile le maintien de la distance de sécurité préconisée d’un mètre entre les personnes.

En revanche, d’autres touristes faisaient bel et bien la queue, en se serrant les uns contre les autres, pour rentrer dans la basilique Saint-Pierre, a constaté l’AFP.

Fabio di Constanza, un Napolitain de 25 ans, n’avait aucune intention d’annuler « un voyage de plaisir déjà programmé », mais il espère que l’épidémie « se terminera vite ».

Une Anglaise de 47 ans, Kersten Wilson, également en vacances, a pour sa part critiqué une « panique non nécessaire » qui s’est emparée de la planète face à l’épidémie.

L’audience hebdomadaire du pape de mercredi prochain, occasion de voir le pape en chair et en os d’encore plus près sur la place, se déroulera aussi sur le même mode que ce dimanche : le pape lira son homélie en direct par vidéo.

Journée des droits des femmes: des milliers de personnes manifestent en Asie

Des Philippines au Pakistan, des milliers de personnes ont manifesté dimanche en Asie à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, même si de nombreux rassemblements avaient été annulés du fait des craintes liées au coronavirus.

En Chine, épicentre d’une épidémie qui a fait plus de 3.500 morts sur la planète, la télévision publique avait choisi de souligner le travail des femmes en première ligne du combat contre la maladie du Covid-19.

Des marches ont eu lieu en Thaïlande, en Indonésie ou aux Philippines. Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées à Lahore, dans le nord-est du Pakistan.

« Donnez nous ce qui nous appartient! », scandait la foule, alors que la société pakistanaise est particulièrement conservatrice. « Nous voulons la liberté. »

En Inde, un marathon exclusivement féminin qui était prévu a été annulé. En Corée du Sud, pays qui compte le plus de cas de contaminations après la Chine, de nombreux événements ont également été annulés à cause de l’épidémie.

« Bien que nous ne puissions physiquement être ensemble, notre détermination à obtenir l’égalité entre les femmes et les hommes est plus forte que jamais », a déclaré dans une vidéo la ministre de l’Egalité Lee Jung-Ok.

De nombreuses organisations féministes avaient opté pour des actions en ligne plutôt que pour des rassemblements physiques, en se ralliant notamment derrière les hashtags #FemaleStrike, #PowerUp ou #38InternationalWomensDay pour tenter d’en sensibiliser davantage à la cause de l’égalité hommes-femmes.

A Bangkok, des manifestantes ont demandé une meilleure protection sur les lieux de travail pour lutter contre l’épidémie. Mais le nombre de personnes présentes était moins élevé que l’année précédente, et ce en raison de la peur du virus.

Des centaines de femmes et d’hommes se sont aussi rassemblés à Manille où ils ont même brûlé une effigie du président philippin Rodrigo Duterte, accusé de misogynie.

« La pauvreté et les violences dont les femmes sont victimes s’aggravent », a déclaré à l »AFP Joms Salvador, du mouvement féministe Gabriela.

« Nous avons beau avoir 37 lois relatives aux droits des femmes, la violence se généralise dans les faits, que ce soit sous la forme de violence conjugale, de harcèlement sexuel ou de viols. »

A Jakarta, environ 600 personnes, certaines maquillées aux couleurs de l’arc-en-ciel, ont demandé au gouvernement l’abrogation de loi critiquées comme discriminatoires et l’adoption de lois contre les violences sexuelles et pour la protection des domestiques.

burs-rbu/amj/jac/lch

Le Liban en défaut de paiement confronté au défi des réformes

Le Liban, englué dans une grave crise économique et désormais en défaut de paiement, a promis d’engager une série de réformes qui constitueront un test décisif pour le nouveau gouvernement, nommé en réponse au mouvement de contestation populaire secouant le pays.

« La vraie question, est-ce que les politiciens feront le nécessaire pour résoudre le problème? », s’interroge Sami Nader, directeur de l’Institut du Levant pour les affaires stratégiques.

« Si la mise en défaut ne s’accompagne pas d’un engagement clair pour des réformes, cela accélérera l’effondrement », met-il en garde.

Le Premier ministre Hassan Diab a annoncé samedi que le Liban ne sera pas en mesure de rembourser 1,2 milliard d’Eurobonds –des obligations émises en dollars– qui arrivent à échéance lundi.

Face à ce premier défaut de paiement de l’histoire du pays, M. Diab a dit avoir mis en place une restructuration à venir de la dette, après des négociations avec les créanciers.

Ce n’est que le dernier rebondissement en date venant illustrer l’effondrement économique, en cours depuis plusieurs mois, d’un pays à la croissance en panne, touché par une forte dépréciation de sa monnaie et des restrictions drastiques sur les retraits en dollars dans les banques.

Avec une dette de 92 milliards de dollars –81,5 milliards d’euros, soit environ 170% du PIB– le Liban fait aussi partie des pays les plus endettés au monde.

Le marasme économique a d’ailleurs été un des principaux moteurs des manifestations inédites déclenchées en octobre, qui ont vu des dizaines, voire des centaines, de milliers de Libanais battre le pavé pour fustiger une classe politique accusée de corruption et d’impuissance face à la crise.

– FMI, seule option? –

Nommé en janvier pour apporter une réponse aux aspirations de la rue, le gouvernement martèle sa volonté d’assainir les finances publiques et d’adopter des réformes attendues depuis des années.

Mais dans un pays habitué aux tractations politiques interminables entre grands partis, les experts craignent des atermoiements.

Le Liban a en tout cas déjà requis une assistance technique du Fonds monétaire international (FMI) pour mettre en place des « réformes », censées restaurer la stabilité et la croissance.

En février, le Premier ministre a reçu à Beyrouth une délégation de l’institution. Pour l’heure, une aide financière n’est pas à l’ordre du jour. Mais l’ampleur de la crise est telle qu’un plan de sauvetage financier semble incontournable, selon des experts.

« Le FMI c’est la seule option pour aller de l’avant », estime M. Nader.

Pour Marwan Barakat, chef du département de recherche à la Bank Audi, il faut que le plan de réformes des autorités garantisse notamment « l’austérité » au niveau des dépenses publiques, mais aussi « une amélioration du recouvrement de l’impôt, une réduction du service de la dette et une réforme du secteur de l’électricité », véritable gouffre financier.

Concernant une aide financière du FMI, la classe politique reste profondément divisée.

Le puissant mouvement chiite du Hezbollah, qui domine le Parlement avec ses alliés, est hostile à cette option. Dans un communiqué jeudi, il avait mis en garde contre des « conditions » imposées par « toute organisation internationale », craignant une « tutelle étrangère ».

– « Banqueroute » –

Dans son éditorial dimanche, le quotidien Annahar a souligné les « risques » auxquels s’exposait le Liban avec son défaut de paiement.

D’autant que le gouvernement s’est engagé sur cette voie « sans le FMI, un médiateur international nécessaire qui aurait pu aider le Liban et lui apporter une couverture vis-à-vis des créanciers », juge-t-il.

Evoquant la menace de poursuites judiciaires, le quotidien indique que le Liban doit trouver un « consensus » avec ses créanciers concernant les négociations sur la restructuration de la dette.

Et pour des discussions fructueuses, le « principal prérequis » c’est un « plan de sauvetage économique faisable et crédible », avertit Mohamad Faour, post-doctorant spécialisé en finances à l’University College de Dublin.

« Du point de vue des créanciers, idéalement cela ferait partie d’un plan de soutien du FMI, qui donnerait au Liban un levier dans ses négociations », dit-il.

La crise actuelle est la pire dans l’histoire du Liban depuis la fin de la guerre civile (1975-1990).

Samedi, M. Diab s’est engagé à réduire les dépenses publiques et à mener à bien les réformes promises en 2018 dans le cadre d’une conférence d’aide internationale, pour obtenir 11,6 milliards de dollars (10,3 milliards d’euros) de dons et de prêts.

Faute de réel changement sur le front des réformes au Liban, ces sommes n’ont toujours pas été débloquées.

Dans une vidéo postée sur Facebook, l’ancien ministre du Travail et professeur à l’Université américaine de Beyrouth Charbel Nahas a fustigé les autorités et leur annonce d’un défaut de paiement.

« Ce n’est pas une vraie décision », a-t-il estimé. « C’est juste la reconnaissance d’une certaine réalité, caractérisée par la banqueroute de l’Etat, de la Banque centrale et des banques commerciales. »

Coronavirus: l’Italie place en quarantaine un quart de sa population

Un quart de la population italienne s’est réveillée dimanche en quarantaine, une mesure sans précédent en Europe décidée par Rome pour endiguer l’épidémie liée au nouveau coronavirus qui a contaminé plus de 100.000 personnes dans le monde entier.

Le patron de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, a salué ces mesures « courageuses » et les « véritables sacrifices » consentis en Italie.

Ces mesures exceptionnelles de confinement, valables jusqu’au 3 avril, couvrent une vaste zone dans le Nord du pays allant de Milan, la capitale économique, à Venise, haut lieu du tourisme mondial.

Plus de 15 millions d’Italiens dans cette « zone rouge » voient leurs déplacements strictement limités. Les frontières restent ouvertes pour l’heure avec les pays voisins, même si Prague a appelé Rome à interdire à ses citoyens de voyager à l’étranger.

Cette mesure radicale évoque celle utilisée dans la province chinoise du Hubei où l’épidémie a démarré en décembre (56 millions d’habitants en quarantaine).

L’Italie, avec plus de 5.880 cas et 233 décès, est avec l’Iran et la Corée du Sud l’un des pays les plus touchés en dehors de la Chine. C’est le pays d’Europe le plus durement frappé.

A Milan, les rues étaient désertes et calmes dimanche matin, a constaté l’AFP. Le confinement concerne toute la Lombardie et les provinces septentrionales de Modène, Parme, Piacenza, Reggio Emilia, Rimini (dans la région d’Emilie-Romagne), Pesaro et Urbino (région des Marches, centre-est), Alessandria, Asti (Piémont, nord-ouest), mais aussi Padoue, Trévise, et Venise (en Vénétie, nord-est).

– Angelus en vidéo –

Bien avant son officialisation tôt dimanche matin, le décret instaurant ces mesures avait été largement éventé. Les plus inquiets ont quitté la zone concernée dès samedi soir, selon des médias italiens. Une fuite « inacceptable » pour le chef du gouvernement Giuseppe Conte.

Dimanche vers 11H00 GMT, 107.021 cas d’infection étaient officiellement recensés dans 99 pays et territoires, causant la mort de 3.648 personnes dans le monde.

Dans sa prière dominicale de l’Angelus diffusée pour la première fois par vidéo pour parer la diffusion du coronavirus, le pape François s’est dit « proche » des malades et de leurs soignants.

En Chine, 27 nouveaux décès et 44 nouveaux cas ont été enregistrés dimanche, portant le total des morts dans le pays à 3.097 avec au moins 80.695 personnes contaminées depuis le début de l’épidémie. L’effondrement samedi d’un hôtel réquisitionné comme lieu de quarantaine à Quanzhou (est) a fait au moins dix morts.

En Corée du Sud, deuxième pays au monde le plus touché après la Chine, le bilan s’élevait dimanche à 50 morts pour 7.313 cas dont 272 nouveaux, le plus petit nombre de nouvelles contaminations en plus d’une semaine. Mais « nous n’en sommes pas au point où nous pouvons parler d’une amélioration », a déclaré le ministre sud-coréen de la Santé Park Neung-hoo.

La Corée du Nord a mis fin à la quarantaine imposée à plus de 3.600 personnes.

– 49 nouveaux morts en Iran –

L’Iran a annoncé 49 nouveaux décès –la plus forte hausse quotidienne depuis les premiers cas officiellement déclarés le 19 février– portant à 194 le total des morts du Covid-19 sur 6.566 cas dans le pays. La compagnie publique Iran Air a annoncé suspendre tous ses vols vers l’Europe jusqu’à nouvel ordre.

En France, cinquième pays le plus touché avec 16 morts et 949 cas, le président Emmanuel Macron réunit dimanche soir son Conseil de défense. Le pays est toujours au « stade 2 » de l’état d’alerte mais le passage au stade 3 –celui de l’épidémie, qui prévoit davantage de restrictions– est inéluctable.

Aux Etats-Unis qui comptent au moins 19 morts sur plus de 400 cas, l’Etat de New York a instauré à son tour samedi l’état d’urgence. Le navire de croisière américain Grand Princess, bloqué au large de San Francisco avec 21 cas parmi les 3.553 passagers et membres d’équipage, a été autorisé à accoster à Oakland (Californie) et commencera lundi à débarquer des passagers ayant besoin de soins, selon l’opérateur Princess Cruises.

La Thaïlande puis la Malaisie ont refusé de laisser accoster un navire de croisière transportant 2.000 personnes, dont des dizaines d’Italiens.

En Egypte, un bateau de croisière avec 171 passagers dont 101 touristes étrangers a été évacué à Louxor (sud) après la découverte de 45 cas portant au total le nombre de cas en Egypte à 48 selon le ministère de la Santé.

Les annulations d’événements sportifs et rassemblements se multiplient. En Italie, le ministre des Sports Vincenzo Spadafora a appelé à suspendre le championnat national de football.

Le Grand Prix de Formule 1 de Bahreïn se tiendra à huis clos du 20 au 22 mars. Au Japon, le Tournoi de printemps de sumo, qui débute dimanche, se tient également à huis-clos. Les Mondiaux féminins de hockey sur glace, prévus du 31 mars au 10 avril au Canada, sont annulés.

Treize pays ont fermé leurs établissements scolaires: 300 millions d’élèves dans le monde sont privés d’école pour plusieurs semaines.

Nombre de pays prennent des mesures d’interdiction de territoire ou de quarantaine pour des voyageurs provenant de pays touchés. Le Salvador a interdit l’entrée aux personnes arrivant d’Allemagne et de France, comme c’était déjà le cas pour les voyageurs en provenance de Chine, Corée du Sud, Italie et Iran. L’Amérique latine avait déploré samedi son premier décès, en Argentine.

burs/lch/cls

Le tourisme thaïlandais frappé de plein fouet par le coronavirus

Des rangées de bus touristiques à l’arrêt, des parcs d’attraction déserts, des plages vides: le tourisme en Thaïlande, si important pour l’économie du pays, est touché de plein fouet par l’épidémie de coronavirus.

« La situation est très mauvaise, il ne reste que très peu de touristes », raconte à l’AFP Songsak Srimuang qui travaille dans un magasin de tatouage de la station balnéaire de Pattaya, habituellement l’une des destinations favorites des visiteurs chinois. « Peut-être que je vais retourner dans ma ville natale et reprendre un travail dans l’agriculture ».

Le nombre de touristes chinois a chuté depuis janvier, le gouvernement chinois ayant interdit les visites de groupes à l’étranger dans le but de tenter de contenir l’épidémie.

Si cela continue, « on va devoir fermer et je n’aurai nulle part où travailler », s’inquiète Kochawan Greeglang, serveuse dans un bar de Pattaya.

En attendant, l’économie thaïlandaise, particulièrement dépendante du tourisme (18% du PIB), poursuit sa décélération.

Et l’autorité du tourisme a dû revoir à la baisse ses prévisions pour 2020.

Elle table pour le moment sur 6 millions de visiteurs étrangers en moins cette année (33,8 millions contre 39,8 en 2019), d’après des données transmises à l’AFP.

Mais la chute pourrait être encore plus sévère si la crise devait perdurer de longs mois.

A ce jour, le royaume compte 50 cas déclarés de coronavirus. Un patient est décédé, 16 sont encore à l’hôpital et 33 sont rétablis.

Le roi d’Arabie saoudite apparaît après l’arrestation de plusieurs princes

Le roi Salmane d’Arabie saoudite est apparu dans les médias d’Etat dimanche pour la première fois depuis l’arrestation il y a deux jours de trois princes, dont son frère et son neveu, accusés d’avoir comploté pour renverser le puissant prince héritier.

La garde royale a arrêté vendredi le prince Ahmed ben Abdelaziz al-Saoud, frère du roi, ainsi que le neveu du monarque, le prince Mohammed ben Nayef, accusés d’avoir préparé un coup d’Etat pour évincer le prince héritier Mohammed ben Salmane, ont indiqué plusieurs sources à l’AFP.

Le roi saoudien apparaît régulièrement dans des cérémonies officielles, mais cette nouvelle vague de répression a soulevé des rumeurs autour de l’état de santé du monarque, âgé de 84 ans, et sur la possibilité que le prince Mohammed lui succède très prochainement.

Mais le roi Salmane a reçu dimanche plusieurs ambassadeurs saoudiens qui ont prêté serment devant lui, selon des photos publiées par l’agence de presse SPA et des images diffusées par la chaîne Al-Ekhbariya, deux médias gouvernementaux.

Depuis qu’il est devenu prince héritier en 2017, en lieu et place de Mohammed ben Nayef, Mohammed ben Salmane est accusé de mener une répression implacable contre toutes les voix discordantes, au sein de la famille royale comme dans le milieu des intellectuels et militants des droits humains.

Burlington, terrain d’expérimentation politique pour Bernie Sanders

« C’est ici que ça a commencé »: le sénateur socialiste Bernie Sanders a fait ses premiers pas en politique comme maire de Burlington, petite ville du Vermont qui a servi de laboratoire pour ses idées de gauche radicale comme pour ses méthodes politiques.

Originaire de New York, Bernie Sanders s’est installé dans cet Etat rural du nord-est des Etats-Unis à la fin des années 1960, en pleine mode du « retour à la terre », après des études à Chicago où il avait milité pour le pacifisme et les droits civiques.

Située sur les bords du vaste lac Champlain, la ville principale du Vermont et ses 42.000 habitants sont plus proches de Montréal (à 150 km) que de Boston ou New York.

Pour « Bernie », aujourd’hui engagé dans un duel féroce avec l’ancien vice-président Joe Biden pour l’investiture démocrate à la présidentielle 2020, ses huit ans aux commandes de cette ville universitaire furent des années d’apprentissage politique.

Il y a appris avant tout à « mobiliser la base », l’un de ses grands atouts aujourd’hui, explique Virginia Lyons, sénatrice au Parlement du Vermont, qui a souvent travaillé avec lui.

« Il a appris que de petits groupes de gens pouvaient faire la différence », dit cette élue démocrate de 75 ans, soit trois ans de moins que l’intéressé.

C’est d’abord sous l’étiquette du petit parti pacifiste de l’Union de la liberté que Bernie Sanders se présente à plusieurs élections locales. Sans jamais percer.

Mais tout change en 1981 lorsque, à la faveur d’une quadrangulaire, il emporte la mairie de Burlington en tant qu’indépendant, avec dix voix d’avance sur le démocrate sortant et à la surprise de tous.

– Environnement hostile –

Les démocrates installés au conseil municipal ont « tenté de le bloquer, l’empêchant même d’exercer les fonctions administratives les plus basiques », raconte Kurt Wright, actuel président du conseil, dont il est l’unique élu républicain.

Dans cet environnement hostile, alors qu’au niveau national le président Ronald Reagan lance un programme ultra-conservateur décrié par la gauche américaine, le nouveau maire de Burlington, qui dénonce déjà les inégalités, cherche des alliés.

Première bataille de ses huit ans à la mairie: empêcher la privatisation des berges municipales du lac, alors en déshérence, où devaient pousser logements et hôtels chics.

Les promoteurs sont dans les starting-blocks, mais Bernie Sanders mobilise ses administrés pour maintenir l’espace public et en faire un lieu de promenade et de développement concerté.

Autre cause célèbre, le logement: en 1986, alors que 336 logements subventionnés menacent d’être convertis en logements à prix du marché, il mobilise responsables locaux et habitants et obtient une reprise du complexe par des associations, garantissant des loyers abordables.

« Il a montré qu’il pouvait stimuler et motiver les gens (…) Ca a commencé à Burlington », relève Kurt Wright.

Avec les entreprises, le bilan est plus mitigé. L’actuel pourfendeur de Wall Street a instauré dans sa ville du Vermont une fiscalité plus lourde sur l’immobilier commercial.

Les entrepreneurs ne sont « pas une priorité de M. Sanders », tranche Kelly Devine, responsable de la Burlington Business Association, principale organisation patronale, qui dit ne l’avoir jamais rencontré.

– « Fouiller les archives » –

Bernie Sanders n’a pourtant pas que des ennemis dans le milieu. Ben Cohen, cofondateur du célèbre fabricant de crèmes glacées Ben & Jerry’s — une institution à Burlington, même s’il a été racheté en 2000 par le géant Unilever — fait campagne pour le sénateur socialiste.

Malgré les critiques, Bernie, qui anima de 1986 à 1988 une émission télévisée locale où il allait, non sans humour, au contact de ses administrés, est loin d’avoir ici l’image d’un homme rêche, réfractaire au compromis.

Comme une quinzaine de personnes interrogées au hasard dans les rues de Burlington, le républicain Kurt Wright dit l’apprécier « personnellement », même s’il rejette ses idées qui mèneraient selon lui les Etats-Unis dans une mauvaise « direction ».

Alors que le duel s’annonce sans merci avec Joe Biden, le passé de Bernie Sanders promet d’être examiné plus attentivement que lors de sa campagne 2016, où ses chances semblaient limitées face à Hillary Clinton.

Les journalistes ont déjà commencé à « fouiller dans les archives » en quête « de choses qu’il a pu dire qui pourraient être utilisées contre lui », dit Kurt Wright.

Le septuagénaire a ainsi dû s’expliquer récemment sur une vidéo de 1985, dans laquelle il disait du bien du système éducatif et de santé du dictateur cubain Fidel Castro.

Et le New York Times a publié vendredi un article depuis la ville russe de Iaroslavl, avec laquelle le maire de Burlington noua un programme de jumelage en 1988, l’année où il fut aussi en voyage de noces à Moscou.

Le quotidien souligne que le gouvernement soviétique considérait alors ces jumelages comme « l’un des canaux les plus utiles » pour sa propagande.

Alors, faut-il craindre Bernie? « Les gens ne devraient pas avoir peur de lui », répond la sénatrice Virginia Lyons. « Il comprend parfaitement ce qu’est la démocratie ».