mars 2020 - Page 21 sur 36 - Journal du niger

Un an après le crash, la solidarité renforcée des pilotes de ligne éthiopiens

Quelques heures à peine après le crash du vol ET302 d’Ethiopian Airlines au sud-ouest d’Addis Abeba, le 10 mars 2019, des personnes en deuil ont afflué dans un bâtiment situé non loin de la piste où il avait pris son envol: le siège national de l’association des pilotes de ligne.

Par un jour normal, le site ressemble à un country club, avec ses membres jouant au tennis ou au basket tandis que des familles sont attablées en terrasse.

Mais le 10 mars 2019, alors que les détails de la tragédie commençaient à émerger, les responsables ont organisé une veillée funèbre impromptue dans le hall d’entrée, où des bougies et des fleurs sont venues progressivement entourer les portraits du capitaine et de son équipage.

Très vite, le lieu attira à la fois des employés d’Ethiopian Airlines qui, en pleurs, vinrent se recueillir pendant leur pause déjeuner mais aussi des citoyens lambdas sans lien direct avec le crash qui fit 157 morts.

« Cette semaine-là, il n’y avait plus aucune place de parking libre ici. Les gens venaient de tout Addis Abeba », se remémore Yeshiwas Fentahun, qui présidait alors l’association.

« Le fait que nous avions cette installation ici était très important, non seulement pour nous mais pour toute personne touchée par l’accident ».

Depuis, l’association a continué de jouer un rôle central dans le travail de deuil de ses quelque 800 membres.

Des pilotes sont ainsi venus sur place pour y trouver un soutien psychologique, organiser des collectes pour les familles des victimes ou encore rebaptiser le terrain de football du nom du capitaine du vol ET302 et grand amateur de ballon rond, Yared Getachew.

Ce type de réconfort sera très important pour les membres de l’association au moment de l’anniversaire du crash, qui va sûrement raviver les traumatismes de la tragédie, explique son ex-président.

« Oui, les gens vont de l’avant mais ce n’est pas toujours facile de passer à autre chose. Ce n’est pas quelque chose qui va forcément de soi », ajoute Yeshiwas.

– Soutien psychologique –

L’Association des pilotes de ligne d’Éthiopie fut fondée en 1964, presque 20 ans après le lancement d’Ethiopian Airlines.

Son siège a de tout temps offert un lieu de détente aux pilotes de retour d’un vol en provenance d’une des 120 destinations désormais desservies par la compagnie, la plus grande du continent avec plus de 110 appareils.

Le capitaine Yared du vol ET302 venait régulièrement les mardis et jeudis soir participer au matchs de football de l’association.

L’ancien président de l’association désormais responsable syndical au sein de la compagnie aérienne se souvient d’un Yared enjoué, qui n’hésitait pas à taquiner les autres joueurs dans un amharique approximatif, lui qui avait la double nationalité éthiopienne et kényane.

Mais l’association dépasse le cadre du simple club de loisirs. Quand un de ses membres tombe malade ou perd un proche, les autres mettent la main à la poche dans le cadre de collectes organisées par le « Comité humanitaire » de l’organisation.

C’est ce comité qui se chargea très rapidement de répertorier et localiser les familles des huit membres d’équipage du vol 302.

« Après que le gouvernement a informé ces gens de la mort (de leur proche), nous les avons contactés et avons entamé ce qui pouvait être fait pour soulager les préoccupations immédiates », explique Yegzeru Belete, qui a piloté pendant 40 ans des appareils d’Ethiopian Airlines avant de prendre sa retraite l’année dernière.

En quelques mois, l’association avait réuni 600.000 birr – plus de 18.000 dollars – pour chaque famille, une somme qui fut remise en mains propres, à Addis Abeba et, dans le cas du copilote Ahmednur Mohammed, à Dire Dawa, à environ 350 km à l’est de la capitale.

L’association a également organisé des sessions de soutien psychologique pour les pilotes, ce que la compagnie a négligé de faire selon Yeshiwas.

« J’aurais préféré qu’Ethiopian Airlines ait une approche plus volontariste pour apporter (…) un meilleur soutien à ses pilotes et membres d’équipage après le crash », déplore le responsable syndical. Mais « ça n’est pas arrivé ». Sollicitée, la compagnie n’a pas souhaité commenter.

– Tragiques réminiscences –

En apparence, la vie quotidienne au siège de l’association a repris son cours normal mais, de par son ampleur, la tragédie du vol ET302 n’est jamais bien loin dans l’esprit des pilotes.

Les articles de presse sur telle avancée de l’enquête, notamment sur le rôle joué par le logiciel anti-décrochage MCAS du Boeing 787 MAX, ou les spéculations sur la remise en service de cet appareil phare de l’avionneur américain, continuent de raviver de très douloureux souvenirs.

L’enquête menée par Ethiopian Airlines n’est pas encore terminée mais son responsable Amdye Ayalew a indiqué cette semaine à l’AFP qu’un rapport d’étape pourrait être divulgué juste avant le premier anniversaire du 10 mars.

Ces rappels permanents de l’accident rendent d’autant plus essentiel le soutien offert par l’association de pilotes à ses membres, selon Yeshiwas.

« Ce n’est pas une chose facile » de continuer de voler après un crash, souligne-t-il.

« Vous vous demandez sans cesse ce que les pilotes ont pu penser, quels ont été leurs sentiments juste avant le crash. Votre esprit n’arrête pas de poser ces questions ».

Des vues aériennes de sites célèbres désertés montrent l’impact du coronavirus

Des esplanades vides, une gare fantomatique et des lieux saints désertés – une série d’images satellite saisissantes révèle l’impact de l’épidémie de coronavirus sur certains des sites les plus fréquentés du monde.

Ces photos aériennes, publiées par la société américaine d’imagerie spatiale Maxar, montrent des villes normalement bondées, de La Mecque à Pékin, aujourd’hui clairsemées.

Une des images montre une poignée de fidèles tournant autour de la Kaaba, le lieu le plus sacré de l’Islam, à La mecque, un site habituellement noir de monde.

Les autorités saoudiennes ont suspendu temporairement le pèlerinage de la Omra – le petit pèlerinage -, une mesure inédite pour lutter contre le nouveau coronavirus, qui a déjà tué 3.000 personnes dans le monde.

En Iran, une image au-dessus du sanctuaire Fatima Ma’sumeh à Qom montre l’un des endroits les plus sacrés du pays sans visiteur alors que ses célèbres dômes dorés scintillent au soleil.

Les cours intérieurs et les rues adjacentes sont également désertes.

Des photos au-dessus de Wuhan, en Chine – l’épicentre de l’épidémie mondiale – montrent des dizaines de trains stationnés à la gare déserte de Dongdamen.

Dans la ville sous quarantaine et pratiquement coupée du monde depuis le 23 janvier, la gare généralement animée a été transformée en dépôt de fortune.

A Pékin, la place Tiananmen porte bien son nom de « porte de la paix céleste », avec seulement quelques dizaines de voitures en circulation et aucun piéton à l’horizon.

Coronavirus: les touristes interdits d’entrer à Bethléem

Les autorités israéliennes ont empêché vendredi l’entrée de touristes à Bethléem, principale ville touristique en Territoires palestiniens, en raison de découvertes de cas de coronavirus qui ont poussé les autorités locales à décréter un état d’urgence sanitaire.

Selon un journaliste de l’AFP sur place, une vingtaine de cars de touristes étaient bloqués au checkpoint à l’entrée de Bethléem, ville située à moins d’une dizaine de kilomètres de Jérusalem.

« Je confirme que les bus de touristes ne peuvent plus entrer à Bethléem », a déclaré à l’AFP Micky Rosenfeld, porte-parole de la police israélienne, entité qui contrôle ce point d’entrée à l’entrée de cette ville palestinienne.

« A la suite de découverte de coronavirus à Bethléem, une décision a été prise hier par le ministère israélien de la Défense en coordination avec l’Autorité palestinienne pour empêcher tout mouvement, vers et depuis, cette ville par les touristes et les habitants », a précisé ce responsable.

Sept personnes ont contracté le nouveau coronavirus en Cisjordanie, selon les autorités palestiniennes qui ont décrété jeudi l’état d’urgence de 30 jours, la fermeture de la basilique de la Nativité à Bethléem, et l’interdiction pendant deux semaines les séjours de touristes dans ce territoire occupé par Israël.

Or c’est dans le secteur de Bethléem qu’ont été identifiés les premiers cas de Covid-19 en Cisjordanie.

« Des personnes contaminées ont visité la basilique » de la Nativité, a indiqué à l’AFP le Père Asbed Balian, de l’Eglise arménienne, l’une des trois qui gèrent cette église, l’une des plus vieilles et les plus connues au monde érigée sur le lieu de naissance de Jésus selon la tradition chrétienne.

Côté israélien, 17 cas du nouveau coronavirus ont été confirmés jusqu’à présent poussant les autorités à interdire l’entrée au pays, sauf rares exceptions, aux voyageurs en provenance de nombreux pays asiatiques et européens, notamment la France et l’Allemagne.

Ces mesures d’interdiction entrent en vigueur vendredi matin menant ainsi à l’annulation de plusieurs vols à destination de l’aéroport international Ben Gourion de Tel-Aviv.

La compagnie allemande Lufthansa avait annoncé jeudi l’annulation de tous ses vols à destination d’Israël.

Vendredi matin, les vols de la compagnie israélienne El Al en provenance de Zurich, Barcelone et Berlin ont aussi été annulés, ainsi que les trois vols d’Air France en provenance de Paris, et les vols des compagnies américaines United Airlines et Delta au départ de France et d’Allemagne.

Syrie: calme rare à Idleb au premier jour de la trêve turco-russe

La province d’Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, s’est réveillée vendredi dans un calme relatif, aucun avion ne sillonnant son espace aérien pour la première fois depuis des mois après l’entrée en vigueur d’un accord de cessez-le-feu russo-turc.

La trêve, entrée en vigueur à minuit (22H00 GMT) semblait tenir vendredi matin après des violences intermittentes durant la nuit, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) et des correspondants de l’AFP sur place.

Le directeur de l’OSDH, Rami Abdel Rahmane, a signalé vendredi matin « l’absence totale d’avions de guerre russes dans l’espace aérien d’Idleb ».

Plut tôt dans la nuit, « des affrontements intermittents et des échanges de tirs ont eu lieu durant les trois premières heures de vendredi puis se sont arrêtés », a précisé M. Abdel Rahmane.

Six soldats syriens et au moins neuf jihadistes du Parti islamique du Turkestan (TIP) –dont les membres appartiennent majoritairement à la minorité musulmane ouïghoure de Chine– ont été tués, selon l’OSDH.

Le président russe Vladimir Poutine et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan sont parvenus jeudi à un accord de cessez-le-feu au terme d’une réunion marathon à Moscou.

L’accord doit mettre fin à des semaines de violences ayant provoqué une catastrophe humanitaire, avec près de 500 civils tués, selon l’OSDH, et près d’un million de déplacées, d’après l’ONU.

Selon le texte de l’accord, la Russie et la Turquie organiseront à partir du 15 mars des patrouilles communes sur une large portion de l’autoroute M4, un axe crucial pour le régime traversant la région d’Idleb.

Ces patrouilles conjointes, une première dans cette zone, auront lieu entre la ville de Tronba à Idleb et un village de la province de Lattaquié, un bastion du régime situé plus au sud.

M. Poutine a dit espérer que cet accord serve de « base solide pour mettre un terme aux combats dans la zone de désescalade d’Idleb » et pour « stopper les souffrances de la population civile ».

L’offensive lancée en décembre par Damas, avec l’appui de l’aviation russe, pour reprendre ce dernier grand bastion jihadiste et rebelle avait par ailleurs entraîné une poussée de fièvre inédite entre la Syrie et la Turquie.

L’armée turque est déployée dans le nord syrien depuis 2016 et soutient certains groupes rebelles à Idleb.

La situation a dégénéré ces dernières semaines, plus de 50 soldats turcs ayant été tué depuis février dans des affrontements directs avec l’armée syrienne ou dans des bombardements attribués au régime.

Des frappes turques de représailles ont abattu plusieurs avions du régime et fait des dizaines de morts parmi les soldats syriens.

Cette escalade a suscité des craintes sur d’éventuels affrontements directs entre Moscou et Ankara.

Déclenché le 15 mars 2011 par des manifestations prodémocratie, le conflit syrien a fait plus de 380.000 morts et n’a eu de cesse de se complexifier au cours des neuf dernières années, avec l’implication de multiples acteurs régionaux et internationaux.

8mars: la Mauritanienne Dioully Oumar Diallo veut rendre les femmes « actrices de leur sécurité »

Dioully Oumar Diallo entend que les femmes soient « actrices de leur propre sécurité ». Après avoir lancé une application pour rendre sûres les courses en taxi, elle a développé des formations d’autodéfense pour les femmes, malgré les pesanteurs de la très conservatrice société mauritanienne.

Après avoir décroché à Dakar un diplôme d’ingénieur en télécommunications, Dioully Oumar Diallo est rentrée en Mauritanie en 2013. Son pays connaît alors un climat particulièrement lourd, après une série d’enlèvements suivis de viols, de tortures et de meurtres, se souvient cette femme de 38 ans.

« J’avais des petites sœurs qui allaient à l’école, je m’inquiétais, ma mère s’inquiétait… Il fallait que je réagisse », dit-elle à l’AFP, à quelques jours de la Journée internationale des droits des femmes.

En 2015, elle crée Taxi Secure. Cette application gratuite pour smartphone permet d’identifier le taxi grâce à sa plaque d’immatriculation, « d’envoyer un message d’alerte si jamais on sent que le taximan veut nous amener à une autre destination » et de géolocaliser le véhicule, explique-t-elle.

Mais elle se rend compte des limites de Taxi Secure: tout le monde ne dispose pas d’un smartphone connecté.

– « Les griffes des prédateurs » –

Elle se lance alors dans un nouveau projet, « Rim Self Défense ». L’idée est de dispenser aux femmes et jeunes filles des formations pour faire face à des agresseurs sexuels. « Il fallait donner aux femmes la possibilité d’être actrices de leur propre sécurité, de s’extraire elles-mêmes des griffes des prédateurs et non d’attendre, souvent en vain, le sauvetage d’un passant », résume-t-elle.

Elle se rapproche donc des salles où sont enseignés le karaté, le judo, le kungfu ou le jujitsu. Mais l’idée que des hommes apprennent les arts martiaux à des femmes passe difficilement dans cette république islamique. L’association se tourne alors vers les rares pratiquantes d’un sport de combat et les forme à transmettre leurs techniques à d’autres femmes.

Les salles d’entraînement sont devenues des espaces d’échange et de sensibilisation sur les questions du mariage précoce et des mutilations génitales, explique Dioully Oumar Diallo, qui milite pour que « cesse l’impunité dont bénéficient les agresseurs sexuels » en Mauritanie.

Un projet de loi sur les violences basées sur le genre, aggravant les peines pour viol et pénalisant le harcèlement sexuel, a été rejeté en 2017 et 2018 par le Parlement.

Les députés ont renâclé sur le concept de « genre », valeur étrangère à la Mauritanie selon eux, sur le droit de voyager sans autorisation du mari ou sur la faculté des organisations d’aide aux victimes à se constituer parties civiles.

Dioully Oumar Diallo a été invitée à présenter son expérience le 6 mars aux « Arabofolies », un festival organisé par l’Institut du Monde Arabe à Paris.

Embarrassée, l’Ethiopie ne sait comment honorer les morts du vol ET302

Gebru Ketema était dehors, affairé avec son bétail, quand le vol ET302 d’Ethiopian Airlines s’est abattu dans un champ proche de son village. Les 157 personnes à bord sont mortes dans le crash.

Les jours suivants ont été frénétiques, les sauveteurs affluant sur place. Gebru et ses voisins les ont accueillis dans leur maison, partageant avec eux leur repas mais aussi leur « peine », se rappelle-t-il.

Un an plus tard, le site de l’accident est entouré par une clôture en bois inachevée et ne voit plus guère de visiteurs, en dehors de quelques proches de défunts venus apporter des fleurs.

« Cet endroit est devenu célèbre à cause de l’accident. On nous a dit qu’ils allaient installer une sorte de monument ici, mais ça n’a pas l’air d’avancer beaucoup », commente Gebru.

A quelques jours du premier anniversaire du crash mardi, Ethiopian Airlines a donné peu d’indications sur ce qu’elle entend faire du site.

En janvier, elle espérait encore utiliser cet anniversaire pour annoncer le vainqueur d’un concours d’architecture pour un monument du souvenir, selon un document préliminaire consulté par l’AFP.

Mais la compagnie semble avoir suspendu, au moins provisoirement, ce projet, des familles de victimes ayant exprimé leur incompréhension face à ce qu’elles jugeaient être une décision précipitée, explique Zekarias Asfaw, qui a perdu son frère dans la catastrophe.

Le désaccord portait sur la question de savoir si Ethiopian Airlines était déterminée à honorer les morts de manière respectueuse, ajoute Zekarias, qui fait partie d’un comité destiné à discuter de ce mémorial.

« Vous vous précipitez parce que vous n’y accordez aucune valeur », a-t-il dénoncé en évoquant la compagnie aérienne, qui n’a pas souhaité répondre aux questions de l’AFP.

« Vous avez une compagnie qui désespère de passer à autre chose, et vous avez des familles qui disent: +Non, nous n’avons même pas eu l’opportunité de nous rassembler et de commencer ce parcours du souvenir », souligne-t-il.

– « Manque de compassion » –

Les familles avaient aussi d’autres reproches à adresser à ce plan. Elles ont fait observer que le document parlait exclusivement d' »hommes et femmes », alors même que des enfants étaient aussi parmi les passagers.

Plus généralement, le document, qui en plusieurs endroits utilisait Wikipédia comme source sur des aspects connus du drame, était bâclé et absolument pas professionnel, selon Zekarias.

« En tant qu’Éthiopien, je suis embarrassé de voir comment tout cela a été géré », dit-il. « La manque de professionnalisme, le manque de compassion… ».

En l’absence d’un site officiel du souvenir, deux autres emplacements ont été aménagés à Addis Abeba depuis un an pour honorer la mémoire des victimes du vol ET302.

Au siège national de l’association des pilotes de ligne éthiopiens, un terrain de football a été rebaptisé du nom du capitaine du vol ET302 et grand amateur de ballon rond, Yared Getachew.

Une plaque en sa mémoire est accrochée sur un mur à côté du terrain.

De l’autre côté de la ville, la cathédrale de la sainte Trinité accueille un autre monument commémoratif en mémoire de Yared et de 16 autres victimes éthiopiennes – les autres victimes étaient de nombreuses nationalités, dont notamment des Kenyans et des Canadiens.

Des plaques comportent deux photos pour chaque victime avec un logo d’Ethiopian Airlines en noir et blanc.

Dans cette cathédrale reposent d’importants dignitaires éthiopiens, comme l’empereur Haïle Sélassié ou l’ancien Premier ministre Meles Zenawi.

– La tristesse ressentie –

Il était donc approprié que les victimes du vol ET302 soient aussi honorées ici, estime le père Hadis Abab Tsegazeab.

« Elles sont ici parce qu’Ethiopian Airlines est la première compagnie d’Afrique et parce que sa contribution à la Nation n’est pas négligeable », précise-t-il.

Les victimes sont aussi honorées de manière privée, y compris par des gens qui n’avaient aucun lien personnel avec elles.

Yared Getachew, un avocat d’Addis Abeba, se souvient de la tristesse qu’il a ressentie quand il a appris l’accident, suivie de sa surprise quand il a su qu’il portait le même nom que le capitaine du vol.

Bien qu’il n’ait connu aucun des passagers, il a décidé d’assister à un service commémoratif à la cathédrale de la sainte Trinité dans les jours qui ont suivi pour « transmettre (ses) condoléances ».

Depuis, lui et son fils de 12 ans, Isaac, ont instauré un petit rituel pour se remémorer les morts chaque fois qu’ils prennent l’avion.

Avant le crash, Isaac, un passionné d’aviation, passait chaque décollage à raconter à son père dans le détail tout ce qui se passait: ce que les pilotes faisaient, ou comment fonctionnaient les ailerons des ailes, par exemple.

Désormais, après le décollage, Yared et Isaac lancent la minuterie de leur téléphone et se recueillent en silence pendant six minutes: le temps séparant le décollage du vol ET302 de l’aéroport d’Addis Abeba et son crash.

« Nous essayons très calmement d’imaginer ce qu’ils ont subi », dit Yared en parlant des victimes.

« Combien ça a dû être difficile pour ceux qui étaient à l’intérieur de l’avion (…). Même la moindre turbulence quand vous êtes dans un avion est extrêmement effrayante. Alors pendant six minutes après le décollage, nous essayons de nous souvenir de toutes ces victimes ».

Jack Dorsey, patron de Twitter, reconsidère son projet africain

Le patron et fondateur de Twitter, Jack Dorsey, que le fonds d’investissement Elliott chercherait à évincer, a annoncé jeudi qu’il reconsidérait son projet de passer une partie de l’année en Afrique, invoquant notamment l’épidémie de nouveau coronavirus.

« J’ai étudié mon projet de travailler de manière décentralisée, comme nous le faisons, avec mon équipe, lorsque nous sommes en déplacement, mais à la lumière du Covid-19 et de tout ce qui se passe par ailleurs, j’ai préféré reconsidérer cela », a-t-il écrit sur le compte Twitter des relations investisseurs de Twitter.

« Quoiqu’il en soit, nous continuerons de rechercher des opportunités en Afrique », a-t-il ajouté.

Cette annonce de Jack Dorsey intervient une semaine après que des medias américains ont rapporté l’intention du fonds d’investissement Elliott Management de démettre le patron de Twitter.

Selon la chaîne CNBC, le fonds de l’homme d’affaires américain Paul Singer lui reproche son intention de partir en Afrique, et le fait de ne pas se consacrer à 100% à Twitter, puisque Jack Dorsey dirige également Square, une autre entreprise qu’il a fondée, spécialisée dans le paiement numérique.

Jeudi toujours, lors d’une conférence dédiée aux investisseurs et organisée par Morgan Stanley, Jack Dorsey a qualifié d' »erreur » l’annonce de son départ, estimant avoir échoué à en expliquer les raisons.

Il a soutenu que le déménagement en Afrique n’était pas un plan pour « simplement se reposer ou prendre un congé sabbatique », mais pour aider à démontrer la valeur du travail à distance et à « comprendre comment ne pas être surchargé à cause des fuseaux horaires ».

Il a indiqué avoir préféré remettre son projet en question en raison de l’épidémie mondiale de coronavirus: à cause « de tout ce qui se passe dans le monde, notamment autour du coronavirus, je dois reconsidérer (…) ce que cela signifie pour moi et pour notre entreprise ».

En novembre, à l’issue d’une visite dans plusieurs pays du continent, Jack Dorsey, fondateur du réseau social Twitter et figure de la Silicon Valley, avait annoncé son intention de passer 3 à 6 mois de l’année en Afrique.

Toou, un village meurt sous le feu croisé des ennemis maliens

Il y a deux mois, les 400 habitants de Toou ont fui précipitamment devant les hostilités entre groupes ennemis, laissant leur village aux fantômes de la guerre malienne pour marcher vers un avenir inconnu.

Aujourd’hui, ils s’entassent dans l’école d’un quartier périphérique de Sévaré, près de la capitale régionale Mopti (centre), dans deux bâtiments qui se font face au bout d’un chemin en terre bordé de terrains vagues.

Dans le bâtiment de droite, les hommes; dans celui de gauche, les femmes et les enfants. « La journée, ça va, mais le soir, il y a des gens partout: ici, là, là et encore là ! On est dix à dormir dans la même pièce », récrimine Housseini Karembe, 65 ans, en agitant les bras.

Lui et les autres sont partis de Toou le 5 janvier, quand des mois de tensions entre chasseurs traditionnels dogons et jihadistes ont atteint leur point culminant pour le village. Sommés de vider la place par les jihadistes, 400 hommes, femmes et enfants s’en sont allés sans rien ou presque, et ont parcouru à pied à travers la brousse et sous un soleil de plomb les 26 kilomètres jusqu’à Sévaré.

Ils ont rejoint sans bruit la masse de plus d’un million de réfugiés et de personnes actuellement déplacées, selon l’agence spécialisée de l’ONU, par les violences dans le centre du Sahel, notamment dans le centre du Mali où se trouve Toou, et au Burkina Faso voisin.

Housseini Karembe est maintenant assis, adossé au mur, dans l’ancienne salle de classe où les inscriptions à la craie sur le tableau rappellent que des enfants venaient étudier ici.

A côté de lui grésille une vieille radio. Plus loin, on a branché des portables sur une batterie de voiture. Au fond, un homme s’emploie à faire de la corde à partir d’un sac de jute.

« Il faudrait des tentes, on ne peut pas rester comme ça dans une école, c’est de la débrouille », peste le vieux Housseini Karembe, marabout du village qui enseignait aux jeunes la parole coranique.

– Plus rien que des marmites –

Ses voisins ont un sourire gêné: « On a un toit et à manger, il ne faut pas trop râler », dit l’un d’eux. Les 400 habitants reçoivent chaque mois des coupons du Programme alimentaire mondial (PAM) pour acheter de la nourriture.

Dans la cour trônent les quelques marmites qui ont pu être emportées. « C’est les seuls objets qu’on a pu emmener quand on a fui. De quoi faire la cuisine », dit Telemo Sombor Ga, 55 ans, frère du chef de village.

Il s’assied au milieu des vieux de Toou, qui opinent du chef pendant qu’il conte leur histoire.

« On est partis un dimanche, le 5 janvier », raconte-il. « On a marché, longtemps. Jusqu’à Baboye, puis Sévaré. Et depuis, nous sommes ici ».

Depuis des mois, Toou était pris « entre les jihadistes et les dozos ».

Les dozos sont des chasseurs traditionnels, appartenant à de nombreuses communautés différentes. Les dozos dogons se sont réunis depuis 2016 en une milice armée qui revendique de défendre les populations contre les attaques jihadistes, en l’absence de l’Etat.

La milice se veut un rempart contre le groupe jihadiste emmené par Amadou Koufa, imam peul qui a pris les armes en 2015 et entraîné des centaines de jeunes dans un jihad de combat sous la bannière d’Al-Qaïda. Les affrontements directs, sporadiques par le passé, sont devenus plus fréquents dernièrement.

Avant, les jihadistes passaient souvent par Toou pour prêcher, mais « ils nous laissaient tranquilles », relate Telemo Sombor Ga.

– « Toou n’existe plus » –

Tout a changé quand « les dozos sont venus s’installer le 18 septembre sur la colline non loin de Toou ». A partir de ce moment, les tensions « n’ont fait qu’augmenter ».

« On était pris entre deux feux », dit-il. « Même les femmes ne pouvaient pas aller en brousse, personne ne pouvait sortir. On était bloqués ».

Le 4, c’est l’attaque. Des jihadistes déboulent à moto dans le camp dozo, les rafales se font entendre encore et encore. A Toou, on espère rester en dehors du conflit.

Mais les jihadistes descendent au village plus tard dans la journée, disent aux habitants de partir, maintenant. D’autres habitants racontent le feu mis aux greniers et aux maisons.

« Toou n’existe plus aujourd’hui », dit un vieil homme.

Dans l’école, la vie reprend. Des dizaines d’enfants courent partout en piaillant, les femmes s’affairent autour des marmites. Tous s’interrogent sur l’avenir.

« On se sent étrangers ici », dit Aminata Karembe, 18 ans, petite-fille du marabout. Elle suivait l’enseignement coranique, rêvait de reprendre le commerce familial. « Pour l’instant, c’est gâché ».

Machistes anonymes: au Mexique, sessions de rééducation pour hommes violents

« Je m’appelle Jaime. Cette semaine, j’ai été violent verbalement et psychologiquement envers ma compagne. Je suis là pour aider et être aidé », déclare un sexagénaire dans une maison d’un quartier cossu du centre de Mexico, dont une pièce a été transformée en salle de thérapie.

« Je te soutiens », lui répondent en choeur une douzaine d’autres hommes, âgés de 20 à 70 ans, en faisant des exercices de respiration, les yeux clos. La main sur le coeur, dans un exercice de sincérité, ils réfléchissent ensuite aux violences qu’ils exercent envers les femmes et la conscience qu’ils en ont.

Au Mexique, où dix femmes sont assassinées chaque jour, de plus en plus d’hommes remettent en question le machisme dominant. L’association Gendes (Genre et développement), fondée en 2009, propose des sessions pour aider ces hommes à se départir de leurs comportements violents.

« Je n’ai jamais été violent physiquement envers une femme, mais je l’ai été sous d’autres formes : psychologiquement, verbalement et sexuellement, parce que j’ai parfois été infidèle. Je le reconnais et je veux changer », raconte Jaime, un architecte de 63 ans qui refuse de décliner son nom.

Jaime a décidé de se rendre à ces sessions sur la recommandation de sa compagne après avoir traversé une crise conjugale.

« La masculinité a toujours été associée à la violence, la domination, la force. Mais actuellement, les choses changent. De nouvelles masculinités émergent qui promeuvent l’égalité entre hommes et femmes », explique Mauro Vargas, psychothérapeute et directeur de Gendes.

A travers les 1.200 sessions que l’association organise chaque année à Mexico, le praticien veut d’abord que les hommes comprennent les différents types de violences contre les femmes : sexuelle, physique, économique, verbale voire numérique.

La question de la violence de genre et des féminicides a surgi au centre du débat au Mexique ces deux dernières années avec de nombreuses manifestations contre l’inefficacité des institutions face aux violences machistes.

Les deux meurtres récents, particulièrement odieux, d’une femme et d’une fillette, ont remobilisé les féministes, qui ont une nouvelle fois critiqué les lacunes de la police, de la justice, et d’un gouvernement complètement dépassé, malgré les espoirs suscités en 2018 par l’arrivée au pouvoir pour la première fois d’un président de gauche, Andres Manuel Lopez Obrador.

– Désapprendre –

Pour Mauro Vargas, des comportements comme le harcèlement de rue, les groupes WhatsApp où sont partagées des photos de femmes nues ou des commentaires sexistes sur les collègues de travail, perpétuent des schémas d’inégalité qui culminent dans des actes de violence machiste.

Lors des sessions de thérapie, les hommes « désapprennent ce que la société leur a appris dans un environnement machiste et misogyne », explique-t-il.

Sans qu’il soit possible de les comptabiliser, ce type de sessions ou de groupes qui explorent de nouvelles formes de masculinité se multiplient à Mexico, avec le souhait de rompre avec la culture patriarcale.

Dans des galeries d’art, des librairies, des hommes, informés le plus souvent par les réseaux sociaux, se réunissent spontanément pour débattre de leur rôle face aux revendications des féministes.

Le machisme n’est pas une maladie, sinon une « décision culturelle », rappelle Arturo Reyes, un psychologue de 29 ans qui travaille à Gendes. « Un macho en voie de rééducation est un homme en déconstruction », ajoute-t-il.

Les participants aux sessions le savent et luttent pour reconnaître et modifier leurs attitudes machistes, très enracinées, voire célébrées, dans la société mexicaine.

Dans la salle de thérapie, les hommes fixent le sol, puis lèvent la tête, reprennent leur force pour partager leur expérience.

Un homme avoue nerveusement avoir battu son fils.

Pour Arturo Reyes, la plus grande satisfaction vient quand, à la fin de la thérapie, l’un d’eux l’embrasse et lui dit : « Grâce à ces séances, ma femme et mes enfants peuvent maintenant m’approcher sans crainte ».

A l’assaut de la mairie de Londres, Rory Stewart s’invite sur le canapé des habitants

Pour conquérir la mairie de Londres en mai, l’ex-ministre conservateur Rory Stewart n’hésite pas à payer de sa personne: il arpente la capitale britannique à pied et dort sur le canapé des Londoniens pour mieux comprendre leurs problèmes.

Il y a vingt ans, cet ancien diplomate de 47 ans avait déjà adopté cette approche peu conventionnelle quand il avait traversé l’Afghanistan à pied.

« Tous les changements commencent lorsque vous posez les pieds sur terre », a-t-il confié à l’AFP en marchant dans Highgate, un quartier arboré du nord de Londres.

Son parcours est aussi original que sa campagne. Ancien soldat, Rory Stewart a été diplomate en Indonésie, dans les Balkans et en Irak. Il a dirigé une association caritative à Kaboul et est aussi un écrivain à succès, grâce à son livre sur sa traversée solitaire de l’Afghanistan.

Du fait de ses voyages à travers le monde, certains lui ont prêté une activité d’espion, comme son père. Ce que l’intéressé dit ne pas pouvoir confirmer.

De retour au Royaume-Uni, le globe-trotteur s’est lancé en politique, devenant député conservateur puis ministre, avant de défier Boris Johnson, l’été dernier, dans la course pour prendre la tête des Tories.

Il a échoué puis a été expulsé de son parti pour avoir contesté la stratégie du Premier ministre sur le Brexit. Il souhaite désormais ravir au travailliste Sadiq Khan la mairie de Londres en mai, se présentant comme candidat indépendant.

« Si vous me demandez si je préfère être Premier ministre ou maire, je préfère de loin être maire », a assuré Rory Stewart, se réchauffant avec une tasse de thé.

– « Les gens se confient » –

Compétent en matière de transports, de logement, de développement économique ou de qualité de l’air, le maire de Londres dispose d’un budget de 18 milliards de livres (20 milliards d’euros).

Il a « un énorme potentiel pour changer les choses », insiste Rory Stewart auprès d’un groupe de jeunes volontaires qui l’ont rejoint pour faire campagne.

Il se filme durant ses promenades et partage ses observations – souvent liées au manque d’arbres – dans des vidéos qui ont fait de lui une sorte de star sur les réseaux sociaux.

Mais il s’est aussi attiré des critiques avec sa campagne #ComeKipWithMe (#VenezRoupillerAvecMoi), dans laquelle il propose aux Londoniens de venir dormir chez eux pour partager leur quotidien, « sur le sol ou un canapé », « dans un logement social ou une péniche ». Certains y voient une forme de tourisme de la misère.

Pour Rory Steward, qui a vécu toute sa vie au Royaume-Uni dans la même maison du quartier londonien huppé de South Kensington, cette démarche lui procure au contraire un aperçu inestimable.

Il a récemment dormi dans un foyer pour sans-abri avec dix autres hommes qui lui ont confié leurs problèmes d’addiction ou de santé mentale.

« En rendant mon lit à six heures du matin, en parlant avec eux de la façon dont ils en étaient arrivés là, j’ai découvert des choses que je n’aurais jamais pu découvrir lors d’une réunion politique, plus formelle », a-t-il expliqué à l’AFP.

Marié et père de deux enfants, il ne compte pas s’arrêter même s’il est élu. « Vous parlez (aux gens) durant la soirée, vous vous réveillez, vous partagez une tasse de thé le matin. Et les gens se confient d’une façon très différente que si vous frappez simplement à leur porte. »

– « Pas un conservateur » –

Le prix des logements, la question des sans-abri et la criminalité endémique, avec une forte hausse des attaques au couteau, figurent parmi les principaux enjeux de la campagne.

Une jeune femme approche Rory Stewart et lui confie ne plus se sentir en sécurité lorsqu’elle sort seule. Le candidat promet de tripler le nombre de policiers locaux et de démissionner s’il ne parvient pas à réduire les crimes violents sous deux ans.

Mais son passé de conservateur pourrait lui porter préjudice: c’est en effet sous les tories, au pouvoir depuis dix ans, que les effectifs policiers ont été fortement réduits dans un contexte d’austérité.

« Je ne suis pas un conservateur », martèle désormais celui qui ne veut pas s’aliéner les habitants d’une ville majoritairement pro-européenne et multiculturelle. « Je suis un indépendant. Je ne suis pas vraiment un professionnel de la politique ».

Mais sans l’appui financier et la force de frappe d’un parti, ses chances de l’emporter sont minces. Le sondage le plus récent, réalisé en novembre, plaçaient Rory Stewart en troisième position, après Sadiq Khan et le candidat conservateur Shaun Bailey.